À l’occasion de la « Journée internationale des femmes de 2024« , l’EU-OSHA vient de publier le 8 mars un nouveau document de réflexion intitulé « Explorer la dimension de genre pour le télétravail : implications en matière de sécurité et de santé au travail« qui passe en revue les évolutions de la législation en la matière et les principaux défis auxquels les femmes sont confrontées.
Il met tout particulièrement en évidence que l’incidence du passage au télétravail et aux modèles hybrides depuis la pandémie de COVID-19 affecte démesurément le bien-être et l’intégration des femmes sur le marché du travail.
Sommaire
Le passage au télétravail : une évolution au désavantage des femmes
Une diversification des télétravailleurs et une réponse pour plus d’autonomie
Le passage massif au télétravail depuis la pandémie de covid-19 a conforté l’organisation du travail en mode hybride grâce à une grande diversité de formules et à une diversification des télétravailleurs à des groupes professionnels tels que les techniciens et employés de bureau, où la proportion de femmes est relativement élevée.
Des inégalités marquées entre les femmes et les hommes
Si cette évolution répond aux attentes de nombreux travailleurs et travailleuses pour plus d’autonomie sur leur lieu et horaires de travail, les dernières données disponibles en matière de SST pour les télétravailleurs telles que l’«enquête Eurobaromètre Flash — Le pouls de la SST», commandée par l’EU-OSHA, montrent les femmes sont désavantagées par rapport aux hommes, notamment en ce qui concerne :
- L’exposition aux risques psychosociaux liés à la pression temporelle, travail isolé, charge de travail, surveillance, manque d’autonomie (cf tableau 1)
- L’incidence des problèmes de santé liés au travail : troubles oculaires, fatigue, stress / dépression ou anxiété, TMS … (cf tableau 2)
- La disponibilité d’initiatives de SST sur le lieu de travail pour prévenir ou traiter le stress et les problèmes de santé mentale.
Exposition aux facteurs de risques psychosociaux (tableau 1)
Problèmes de santé liés au travail dans les 12 derniers mois
Explication de la surexposition des télétravailleuses aux problèmes de santé
La revue de littérature existante explique la surexposition des télétravailleuses aux problèmes de santé liés au travail et aux risques psychosociaux par la combinaison de quatre principaux facteurs :
- Une répartition inégale du temps de travail non rémunéré qui se traduit par un « appauvrissement du temps disponible » chez les femmes et un conflit entre le travail et la vie personnelle ; la mauvaise qualité du temps de travail (longues heures de travail et heures non sociales) entraîne une dégradation de la santé plus marquées chez les femmes que les hommes.
- L’inégalités en termes de politiques d’entreprise en matière de temps de travail. En particulier, le fait que les femmes sont moins susceptibles de bénéficier d’un certain niveau d’autonomie sur leur temps de travail.
- La prévalence de cultures professionnelles associées au « travailleur idéal » dans les entreprises, où les travailleurs sont censés donner la priorité à l’activité professionnelle, travailler de longues heures et rester disponibles en dehors des heures de travail.
- Des facteurs institutionnels nationaux liés aux politiques sociales qui se traduisent par un faible niveau de défamiliarisation – qui désigne l’externalisation par les familles des tâches de care, qui favorise la liberté et l’indépendance économique des femmes dans les pays occidentaux –, des politiques de conciliation travail-vie personnelle et la réglementation du télétravail.
Agir sur les inégalités entre les hommes et les femmes
Le document souligne que des dispositions tenant compte de la dimension de genre dans le domaine du télétravail et du travail hybride peuvent contribuer à l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée des femmes et à leur intégration sur le marché du travail.
Il préconise des réformes réglementaires tenant compte de la dimension de genre et des études supplémentaires portant sur les préjugés liés au genre dans les politiques nationales. Parmi les lacunes recensées en matière de recherche figurent :
- La dimension de genre de la cyber intimidation / harcèlement
- Les politiques de SST de l’entreprise au niveau du genre,
- L’absence d’aspects liés au genre dans la réglementation du télétravail axée sur la SST.
Ressources
Définition
- « Défamilialiser la politique sociale signifie s’engager à collectiviser le poids et les responsabilités de la charge familiale, condition préalable pour les femmes qui cherchent à harmoniser travail et maternité. » — (François-Xavier Merrien, Raphaël Parchet, Antoine Kernen, L’État social, 2005)
Pour en savoir plus
- EU-OSHA. (2024). Exploring the gender dimension of telework: implications for occupational safety and health [Discussion Paper]. EU-OSHA. https://bit.ly/43q5Tfr
- L’«enquête Eurobaromètre Flash — Le pouls de la SST», commandée par l’EU-OSHA, fournit des informations précieuses sur toute une série d’effets de la pandémie de COVID-19 affectant la santé et le bien-être des travailleurs ainsi que sur les mesures connexes prises sur le lieu de travail, y compris l’utilisation croissante des technologies numériques dans le cadre professionnel.
- Section thématique du site de l’EU-OSHA sur « Les femmes et la sécurité et la santé au travail« .
- Thématique « égalité Femmes-Hommes »
Crédit Photo Kelly Sikkema
